C’étaient les jeudis après-midis qu’on allait rendre visite à Mémé.

On chantait et sautait tout au long du trajet. On allait passer un bon moment ensemble. Rien qu’elle et nous. Elle nous attendait devant sa maison. On s’embrassait, se serrait. La petite dernière prolongeait les câlins en plongeant son nez entre ses deux seins, ce qui les faisait rire toutes les deux. Mémé n’était jamais à court d’idées et on savait qu’elle aimait nous faire découvrir et s’essayer à de nouvelles choses et des nouveaux outils.
Selon le temps qu’il faisait ou la saison, on allait d’abord faire un tour à pieds, donner à manger aux bêtes, admirer la nature ou ses dernières confections et on rentrait faire un jeu de société ou bricoler avec elle. On jardinait parfois, ou on faisait des travaux de peinture comme des adultes. Elle nous a appris à tricoter avec de la laine ou des brins d’herbe et nous a montré comment broder nos espadrilles pour les raccommoder ou rafraichir les murs de sa cuisine façon patchwork quand il ne lui restait que des fins de pots.
Puis, par instinct de trop d’amour ou par expérience parce qu’elle voulait nous remercier de partager ces instants de vie, elle prévoyait toujours un super goûter. Sa crème au lait de brebis, qu’elle présentait dans des petits ramequins, était ma préférée. En effet, Mémé avait une « moutonne » qu’elle allait traire tous les soirs, avec un ou deux petits en début de printemps, et le jeudi elle avançait un peu l’heure de la traite car on aimait bien la regarder faire. Elle incorporait à ce dessert deux ou trois bons œufs de ses poules et elle l’épaississait aux perles du japon pour remédier à l’intolérance au gluten ou à la protéine de lait de l’un ou l’autre. C’est ce qui lui donnait cette texture veloutée. On suçait nos cuillères jusqu’à ce qu’il n’en reste plus une goutte au fond de nos bols. Pour les goules sucrées ou les affamés, elle sortait aussi le pot de miel et des carrés de chocolat noir qu’elle étalait ou râpait sur une galette de maïs beurrée ou des crêpes.
Pour terminer, elle ouvrait sa boite de bonbons en nous proposant un berlingot ou une bêtise en nous faisant promettre de bien se brosser les dents le soir venu. Ils étaient beaux, colorés et sentaient bon. Je me souviens avoir longtemps souri avant d’avoir vraiment compris ce qu’elle nous disait là. Et avant de partir, on se serrait à nouveau et on s’embrassait, chacun à sa manière.
Miel perle brebis crème sein velouté traire chocolat poule berlingot intolérance incorporer instinct étaient les mots récoltés pour les dernières Plumes de mai chez Emilie.

Coucou
Texte très émouvant et tout en douceur:
Bravo PatchCath, quel beau texte émouvant 🙂
Merci Pativore 😉 Les mots étaient plein de douceur, je n’ai eu qu’à ouvrir ma boite à souvenirs
Ah les goûters que l’on prend chez les grands-mères ! Moi, je ne peux parler que de ceux que je concocte pour mon petit-fils. Je n’ai connu aucune de mes mémés, juste mon grand-père paternel que nous appelions Parrain. Il était le parrain de notre soeur aînée, il était donc le nôtre aussi. Dans les familles nombreuses on partage et …on se dispute les goûters, faut être débrouillard ! 😀 Très beau récit qu’indus replonge tous en enfance, même si ce n’est pas exactement celle qu’on a vécue, on a pu la rêver. Bisous
PS : mon oeil commence à aller mieux, je peux (?) m’attarder un peu sur l’ordi ! Je continuerai mes lectures demain. Buenas noches 😀
C’est précieux aussi un grand-père, je n’en connu qu’un et j’ai de très bons souvenirs. J’entends souvent son rire. Si mes filles n’en ont pas eu, nos petits par contre profitent des leurs 😉 Les yeux aussi sont précieux, prends soin de toi ❤
Tu écris toujours de très jolis textes qui sont agréables à lire. Merci pour ce petit moment de douceur.
Merci Domi 😉
Quel joli texte qui me rappelle tant de souvenirs !
Bon week-end !
La récolte était pleine de douceur et j’ai l’impression qu’on a cette faculté de remplir notre mémoire que de bons souvenirs, alors Mémé est revenue 😉 Merci Lydia. Le week-end fut bon, tu vois, je n’ai pas ouvert l’ordi
ah les gentilles mémés, quelle belle invention, qu’elles soient remerciées!
Merci Adrienne 😉
Des souvenirs forts visuels, on devine l’affection pour cette grand-mère dans chacun de tes mots. C’est très émouvant.
C’était simple aussi 😉 Merci Laurence
Tu as fais avec ces mots un texte bien émouvant……..J’aime beaucoup Pat…
C’était facile que fouiller un peu dans ma mémoire 😉 et bien sûr que la poussière de ce grenier-là se nomme émotion ❤ Merci Ghis
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Bon jour Pat,
Souvenirs d’enfance ici présentés comme un beau tableau dont la texture reste intact … 🙂
Bonne journée
Max-Louis
Bien sûr que la scène est presqu’intacte 😉 mais on en parlait l’autre jour, et j’ai l’impression que selon l’âge de la sœur ou du cousin, on n’a pas vécu le même moment et on n’a pas le même ressenti. Merci de tes mots Max-Louis et belle journée à toi-aussi
Excellent texte qui me propulse directement dans mes propres souvenirs. J’ai savouré tous ces instants de cette visite à Mémé avec beaucoup de plaisir.
Concernant la photo mise aujourd’hui sur mon blog j’ai un petit Olympus qui a une vitesse de déclenchement idéale. Quant au petit – fils il ne voyage jamais sans son skate !
Merci Gisèle 😉 j’apprécie beaucoup tes mots ici, et chez toi encore plus ❤
Merci Patchcath pour cette madeleine de Proust sans madeleine et sans Proust mais avec tous les ingrédients d’un beau souvenir plumé ! Je n’ai de blog que le nom (pour l’instant ?!?), j’ai donc participé, un p’tit peu et pour rire, en commentaire chez Émilie (la récolte).🙂
J’ai lu ça 😉 et beaucoup aimé ❤ J'espère que tout sera vite résolu pour toi.