Il se glissa dans le verger sans prêter la moindre attention à l’agitation hivernale des écureuils dans les arbres.
Il ne pouvait néanmoins pas s’empêcher de remarquer que ses vaches meuglaient dans la pâturage. On ne s’était pas occupé d’elles, et il allait falloir vérifier que le tout jeune veau allait bien. Tout à l’heure il irait leur distribuer du foin. Très souvent il passait ses journées à faire la liste des taches qui restaient à accomplir tout en menant d’autres à bien, et il ne put s’empêcher d’en dresser mentalement une nouvelle tandis qu’il fixait la porte de l’écurie entrebâillée d’une bonne trentaine de centimètres. En approchant de l’allée de graviers, il s’appliqua à marcher sans bruit, percevant tout de même dans la friction des petits cailloux écrasés sous son poids l’inventaire de tout ce qu’il lui faudrait faire le lendemain avant l’aube. Du bois pour les deux poêles. Le lait. Les œufs. Le bétail à déplacer d’un pré à l’autre et les cendres à ramasser dans le fumoir.
Extrait de « le sillage de l’oubli » de Bruce Machart. Je me suis laissée tomber dans ce livre à l’écriture vertigineuse.